- Souvenirs
d'enfance.
- Célestin
Freinet
- bulletin des Amis de Freinet n°11 mars 1972
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- Il y a des individus qui pourraient, en
partant d'une date précise, donner par le menu la
succession des événements, comme si un
secrétaire consciencieux et minutieux les avait
notés tout au long des jours. Chez moi, le
secrétaire a fort mal rempli ses fonctions et seuls
surnagent dans mon esprit les pensées, les faits, les
sensations qui l'ont particulièrement impressionné.
C'est seulement ce qui surnage ainsi de ma vie sensible que je
pourrai donc noter, mais alors avec tout le luxe de
détails, d'odeurs, de bruits, de gestes qui sont encore en
moi comme s'ils étaient d'hier...
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- Ma mère ne voulait pas que nous
jouions avec le feu. Je saurai plus tard qu'elle avait quelques
raisons à cette crainte: un frère plus
âgé s'était brûlé atrocement un
jour, en allumant un feu à la campagne. Il était
mort la nuit suivante...
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- L'école ne m'a pas marqué,
ni en bien ni en mal (...) Je me souviens comme dans un rêve
de mes débuts à l'école. Je crois me rappeler
vaguement que j'ai brûlé les étapes de mon
syllabaire. Je me souviens aussi d'une lecture collective qque je
faisais devant le tableau mural. Je ne sais pas ce qu'il pouvait y
avoir sur le tableau ni qui nous faisait lire, ni comment, mais
j'ai encore dans le cou cette vive impression de lassitude et de
courbature que je ressentais au bout d'un moment à tenir,
moi si petit, la tête levée vers le haut du
tableau.
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- J'ai un autre souvenir, physiologique
aussi: je suis assis sur le banc, mes jambes pendent, je me mets
à les balancer mécaniquement et ce balancement
m'endort presque, lorsque tout à coup mon gros soulier
heurte le fer du banc et fait un bruit qui me tire de ma
somnolence et m'effraie, car il m'a semblé que toute la
classe en avait été bouleversée. Me rappelant
ces détails, j'ai souvent pensé plus tard que nombre
d'inattentions des enfants ont bien souvent tout simplement une
cause physiologique, mauvaise position, fesses endolories par le
banc, jambes non soutenus, fatigue de douleurs selon les
positions. (...) Comment ai-je appris à lire et à
écrire? Je n'en sais trop rien... Je ne me souviens d'aucun
effort, d'aucune leçon.
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Amis de Freinet
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