II MALGRÉ LA GUERRE, LES RÉPUBLICAINS ESPAGNOLS CONTINUENT LEUR UVRE DE TRANSFORMATION DE LÉCOLE.
LÉCOLE
NOUVELLE
UNIFIÉE DE
CATALOGNE
EXTRAITS DE
LÉDUCATEUR PROLÉTARIEN
1er JANVIER 15 JANVIER 1937
7 8
Éditions de lImprimerie à lécole Vence (A.-M.)
Un symbole !
Au moment même où les avions de Franco bombardent les écoles madrilènes, tuant, mutilant, martyrisant des enfants, le peuple, soulevé unanimement contre la rébellion fasciste, installe dans les palais et les parcs des grandes masses décoliers dont il organise la vie et léducation.
Le peuple, passionné à secouer ses chaînes, a une conscience diffuse, mais sûre et inébranlable de son rôle historique. Il sent dinstinct que lavenir lui appartient et cest pourquoi, dans les instants tragiques où il est menacé danéantissement, il donne encore le meilleur de lui-même aux généreuses uvres de vie dont il attend, pour demain, la réalisation de la société fraternelle quil rêve et quil entrevoit.
Et cest un deuxième aspect, non négligeable, de lhéroïsme admirable du peuple espagnol, que, dans lhallucinant spectacle du branle-bas guerrier, il poursuive, avec plus de vigueur et plus daudace que jamais les besognes essentielles déducation nouvelle.
Nos camarades espagnols, nos camarades catalans plus spécialement, comprennent quils sont là-bas à laurore dun monde nouveau, et que ce monde nécessite dautres hommes, laffirmation de valeurs culturelles plus efficientes, des techniques mieux adaptées aux buts rationnels de lécole du peuple.
En pleine bataille, ils viennent de publier un document officiel qui est un acte de toute première valeur et que nous nous en voudrions de ne pas reproduire sinon intégralement, du moins dans ses chapitres essentiels.
On connaît leffort et lorientation de la pédagogie soviétique ; nous avons publié récemment les grandes lignes du nouveau PLAN DÉTUDES BELGE. Voici maintenant leffort original de la pédagogie révolutionnaire catalane.
Lisez ce texte. Vous verrez à quel point il est directement inspiré de nos idées, dans quelle mesure lécole catalane sefforce de marcher dans la voie que nous avons préparée et précisée. Et ce fait ne saurait nous étonner puisque nos adhérents de Catalogne, avec leur COOPÉRATIVE DE LA TECHNIQUE FREINET, et leur fondateur et dirigeant H. Almendros, aujourdhui inspecteur-chef de la province de Barcelone, sont parmi les meilleurs ouvriers de la lutte libératrice catalane et espagnole.
Si nous faisons cette remarque, cest plutôt pour marquer un point dhistoire que pour nous enorgueillir dun triomphe qui nest que partiellement notre uvre. Nous sommes satisfaits au contraire de voir nos camarades garder en face des réalités cette attitude humble et loyale qui est la nôtre. Il sagit moins de fixer « a priori » les lignes intangibles dune méthode que de sentir, de comprendre, de préciser une orientation, de donner un sens humain à léducation, de mettre enfin au service de la rénovation scolaire tous les moyens nouveaux qui soffrent ou que la lutte prolétarienne conquiert aujourdhui par les souffrances et par le sang.
Conscients de notre rôle de lutteurs prolétariens, nous nous contentons dassurer nos camarades espagnols de notre collaboration fraternelle et de notre plus vif désir daider passionnément à une expérience effective déducation nouvelle populaire, fondée puissamment dans les besoins du peuple, pour lexpression maximum des possibilités de ce peuple.
Nous nous en voudrions de laisser sous-entendre quelque opposition de quelque nature quelle soit entre lévolution de la pédagogie soviétique et la nouvelle orientation espagnole et catalane.
LU.R.S.S. a été, à sa naissance, victime de graves erreurs idéalistes dans le sens de cette éducation nouvelle bourgeoise que nous avons maintes fois dénoncée. Elle a dû, par ses propres moyens, à une échelle unique au monde, remonter un courant sans précédent et organiser au milieu des pires difficultés léducation du peuple.
LEspagne trouve, idéologiquement et techniquement, le terrain quelque peu déblayé. Elle peut sy engager sans risques graves. Et nous avons quelque fierté à sentir que, parmi les nombreux ouvriers qui ont contribué à déblayer ce terrain, les centaines dadhérents de notre groupe, les réalisations de notre Coopérative de lEnseignement ont, mondialement, une place dhonneur.
Cette reconnaissance indirecte est notre récompense, lassurance que nous sommes dans la bonne voie et la réponse en même temps aux critiqueurs à courte vue qui ne comprenaient pas lurgence révolutionnaire de notre tâche pédagogique.
Comme nos camarades espagnols, continuons donc notre lutte ardente sur les deux fronts : antifasciste et pédagogique. Et un jour prochain, peut-être, une collaboration complète et effective avec nos camarades espagnols triomphants nous permettra de réaliser plus pleinement encore nos buts déducation prolétarienne.
C. FREINET
Création du Conseil
de lÉcole Nouvelle
Unifiée
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La volonté révolutionnaire du peuple a supprimé lécole à tendance confessionnelle. Voici venue lheure dune école nouvelle inspirée par les principes rationnels du travail et de la fraternité humaine.
Il faut maintenant organiser cette nouvelle école unifiée qui doit non seulement se substituer au régime scolaire que le peuple vient dabattre, mais créer surtout une vie scolaire animée du sentiment universel de solidarité et répondant aux nécessités de la société humaine doù nous aurons éliminé tous les privilèges.
Sur la proposition du Conseiller de Culture et daccord avec le Conseil exécutif, JE DÉCRÈTE :
ART. 1 Est constitué le Comité de lÉcole Nouvelle Unifiée, qui aura pour but :
PRÉAMBULE
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Cest lavènement de la République qui marque un moment crucial dans lhistoire de Catalogne et dans lhistoire dEspagne, non seulement dans lordre politique, social et économique, mais encore dans lordre éthique et culturel. Depuis lors, une nouvelle morale donne une forme substantielle à lâme citadine et, en réveillant les énergies raciales, oriente léducation et lenseignement dans un sens populaire. Comme conséquence de cette première révolution, les lois fondamentales de lÉtat se hâtent de regrouper les vieilles nécessités de liberté et de justice, en même temps quelles sefforcent de transformer en directives et en préceptes les nouvelles aspirations de la classe prolétarienne, vers le savoir et la culture.
Ce formidable instrument de domination quest lintelligence cessera dêtre le seul patrimoine des familles aisées et recevra entre les mains des ouvriers cette sève nouvelle contenue dans limpulsion dune nature non encore corrompue par le luxe et loisiveté. La ploutocratie, par un égoïsme criminel et incompréhensible, a laissé dans lombre de lignorance et pendant plusieurs générations, un grand nombre dintelligences, en les maintenant prisonnières de la violence et du fanatisme.
La constitution de la République Espagnole et le statut intérieur de la Catalogne, en consacrant les principes fondamentaux de la nouvelle pédagogie et de lorganisation moderne de lenseignement, nont fait que consacrer les projets et les réalisations qui avaient pris naissance dans chaque individu et dans le domaine des communautés politiques et ouvrières. Ils établissent que lenseignement se développera selon les principes de lÉcole Unique et que lÉtat, sans autre considération que laptitude et la vocation, facilitera aux plus déshérités laccès à tous les degrés de lenseignement.
Voyons aujourdhui le nombre considérable « dinadaptés » par suite dune erreur didéologie, par un manque de cordialité ou par organisation sociale défectueuse.
Ces hommes ne sont pas, comme on la affirmé maintes fois, des résidus dune société décadente ou des produits monstrueux de la nature humaine ; ce sont presque toujours des hommes déplacés, qui nexercent pas dans le monde où ils vivent la fonction adéquate à leur tempérament et à leur caractère. De tels hommes doivent supporter le lourd fardeau dun travail quils ne dominent pas et dans leur âme couve lamertume dune injustice irréparable. Ce que la nature leur a prodigalement accordé, plus tard, la volonté malfaisante des hommes le leur conteste.
Déjà, le statut intérieur de la Catalogne signale les quatre idéaux de lenseignement : travail, liberté, justice sociale et solidarité humaine. Travail qui est le qualificatif qui élève le plus un homme. Qui ne connaît pas les inquiétudes du travail, ne peut pas comprendre le sens de luvre propre ni expérimenter la joie de la considération de son prochain. Par la nature, NOUS SOMMES, par le travail NOUS VALONS. Nous ne pouvons pas dire que les choses que nous trouvons ou que nous recevons gratuitement, nous appartiennent, mais seulement celles auxquelles nous associons notre âme par leffort et la douleur, celles-là, nous pouvons dire quelles nous appartiennent en propre. Cest alors que la propriété a une signification élevée et spirituelle et non grossière et égoïste.
Un des attraits du travail nous est procuré par la liberté humaine et pour cela, la liberté est un autre des idéaux de la Nouvelle École.
La liberté est aussi vieille que le monde, mais sont aussi vieux que lui, la tyrannie et lesclavage. Maintenant la liberté est de nouveau contestée ; on dit quelle subit une crise, comme si elle nétait plus à la mode. Pour la réincorporer dans la vie des peuples espagnols, nous sommes en train de soutenir une guerre. Et le monde entier contemple cette guerre, comme un fait dintérêt universel, parce quelle se décidera un lutte didées, dont les défenseurs se trouvent au delà des frontières et sur toutes les frontières. Mission fondamentale, celle de lÉcole nouvelle, parce quelle saura restituer à lhomme lattribut de la liberté qui le rend supérieur à la plante et à la bête.
Deux nouvelles valeurs de la vie moderne se sont ajoutées à ce mouvement de restauration scolaire. Sans elles, la culture manquerait de sens. Ces deux valeurs sont : la Justice sociale qui implique la réorganisation politique et la Solidarité humaine qui tend à assujettir les activités individuelles au bien-être collectif. Autour de ces nouveaux idéaux, la nouvelle pédagogie crée de véritables centres dintérêt. Dans chaque conseil, dans chaque règle, dans chaque modèle et dans chaque exemple, lenfant doit faire connaître sa valeur en pensant à lautre enfant qui est son camarade, et non en exigeant pour lui quelque chose qui représenterait une diminution dans les droits et les facultés de lautre. LÉcole Nouvelle veut donc dire École dhommes qui travaillent, dhommes libres, dhommes justes, qui saiment et sentraident comme des frères.
Cependant à lénoncé de ces paroles, nous avons un doute. Ce sont en effet des paroles qui, en ce moment, peuvent sonner à nos oreilles comme une chose importune et même ironique. La vieille école, les vieux maîtres, les vieux livres nont pas pu éviter la guerre. Nous autres, nous le disons solennellement et nous acceptons toute la responsabilité que comporte cette affirmation : en édifiant la nouvelle culture, nous avons le ferme dessein de rendre les guerres odieuses et, par cela même, impossibles.
Cela, doivent le savoir, les partisans des systèmes pédagogiques périmés, ceux qui luttent contre nous pour des préjugés traditionnels, ceux qui regardent avec dédain notre uvre, et considèrent vertigineux, son cours ; ceux qui, sous lapparence dune critique impartiale, cachent une neutralité suspecte
A tous, nous devons dire que lÉcole Nouvelle est non seulement une méthode qui recherche une application plus juste des procédés éducatifs, mais aussi quelle aspire à fondre en une unité solide et persistante la vie humaine qui est toute de variété, de mouvement et de rénovation des consciences. Voilà quel est le secret de lÉcole Nouvelle : Porter lenfant depuis sa première initiation dans le monde de la culture, jusquà la pleine formation de son intelligence et de son caractère.
Le Décret de la Généralité qui a crée le Conseil de lÉcole Nouvelle Unifiée a donné la véritable interprétation au moment révolutionnaire que nous vivons. Dans la marche coordonnée de la coutume, de lopinion et de la volonté sociale que modifie la loi, il y a eu, en interférence, la courant rénovateur des forces libératrices de lheure actuelle. Quelles soient les bienvenues. Les aspirations daujourdhui sont nos idéaux dhier : quil ny ait pas un seul enfant sans école, que lécole soit son second foyer et que lambiance de lécole soit saturée de liberté et de justice. Une seule humanité, une seule famille.
Afin de pouvoir réaliser cette uvre, nous nous sommes unis les hommes de toutes les philosophies et de toutes les idéologies sociales. Nous avons la prétention de voir si la culture nous rapprochera tous. Nous avons rayé de nos programmes tout ce qui représente une opportunité ou possède un arrière goût matérialiste et nous ne voulons conserver que lidéalité et le sens spirituel de la vie.
Cest parce que nous plaçons au-dessus de tout la dignité morale et la pureté de laction, que nous pensons à un lendemain plus juste et plus humain et cest pour cela que nous désirons créer une École nouvelle, au sein de laquelle le feu de la liberté et du Progrès ne séteindra jamais et dont lenseignement qui en découlera saura étouffer dans lâme de lenfant les instincts ataviques de haine et de lutte, tout en réussissant à réveiller les inclinations qui prédisposent à la fraternité et à lamour entre les hommes.
Ce désir nest pas un rêve, mais une réalité et surtout un devoir qui nest autre chose que la solidarité entre tous et pour tous.
PLAN GÉNÉRAL
DENSEIGNEMENT
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BASES FONDAMENTALES
Notre plan denseignement repose sur les trois bases suivantes :
1° Lenseignement commence aussitôt la naissance de lenfant et sans solution de continuité, se poursuit jusquà la formation totale technique et spirituelle de lhomme.
2° La vie en commun des uns et des autres est obligatoire, sans distinction dorigine ni de but poursuivi (Groupes).
3° La sélection ultérieure se fera sur la base de facteurs nettement individuels (intelligence et volonté).
Ces trois principes nous paraissant fondamentaux, nous allons les détailler.
1° Si nous « commençons » lenseignement à la naissance de lenfant, nous rendons avec égalité la culture accessible à tout le monde : normaux et anormaux, bien doués et mal doués. Il ny a pas de distinctions « aprioristiques » qui pourrait porter préjudice à la formation de lenfant, non seulement du point de vue intellectuel, mais aussi des points de vue psychologique et social.
2° La vie en commun nous semble utile pour deux raisons bien distinctes : en premier lieu, parce quelle facilitera grandement la sélection, suivant les prédispositions personnelles de chacun, prémices daptitude. Ensuite parce que ne peut échapper à personne la répercussion sociale quaura cette homogénéité dès le début. Quand nous disons « vie en commun sans distinction dorigine », nous voulons dire, évidemment, que la situation sociale de lenfant ne doit pas être la cause de son isolement. Aisés ou misérables doivent vivre en compagnie, avec les mêmes avantages culturels, sans autre différence que celle qui peut découler de leurs possibilités mentales et de leur volonté.
Même dans le cas dune différence individuelle notable, il sera fait simplement une homogénéisation suivant les possibilités mentales et nous pourrons ainsi séparer des groupes scolaires différents dans un même cycle, en veillant cependant à ce quil ny ait pas dordination numérique de groupes. Et encore cette séparation ne sera que foncièrement scolaire. Il existera dautre part une vie en commun pour tout ce qui sera pré-scolaire et para-scolaire.
Quand nous écrivons « Vie en commun sans distinction de but final », nous voulons dire que doivent, coïncider (au moins dans les travaux mécaniques et les travaux manuels) les études délèves comportant des possibilités différentes. Il en sera ainsi, par exemple, des Universitaires et de ceux qui fréquenteront les Écoles techniques à tous leurs degrés. Cela, naturellement avec les restrictions que conseillent lâge et la classification initiale de lélève.
3° Finalement, il faudra un grand soin dans le choix des enfants bien doués. Tous sans distinction portent en naissant une hérédité. Cest ce patrimoine individuel qui devra décider, et lui seul. Ce choix ne devra avoir dautre but que celui de dire : « A quoi servira tel ou tel enfant ». Tout le monde peut servir la communauté. Et si tout le monde sert bien et avec de la bonne volonté, cette sélection ne sera plus un choix, mais une distribution de capacités en accord avec les nécessités collectives.
Toutes les nécessités sont nobles et si lon agit honnêtement, il faut avoir grand soin de faire la plus grande part à la volonté, comme facteur primordial de choix. Choisir uniquement un étudiant parce quil est intelligent, semble être une plus grosse faute que de le choisir parce quil est simplement doué de beaucoup de bonne volonté.
Détails du Plan dEnseignement
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ÉCOLE BERCEAU
(JUSQU'À TROIS ANS)
Pendant la durée de lÉcole-Berceau, nous estimons que lon doit rendre à lenfant, un triple service :
ÉCOLE MATERNELLE
(DE TROIS A SIX ANS)
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Période des jeux et de lair libre (plein-air). Les enfants ont une grande tendance à faire appel à leur imagination. Il faut que le maître soit prudent en évitant de lexalter. Il faut même quil la laisse sépanouir en toute liberté, pourvu que cette activité imaginative soit provoquée par des faits réels et concrets. Les jeux que lenfant choisit sont suggérés par des choses quil connaît. Ces choses sont réelles ; ce sont celles que lui-même utilise ou quil voit utiliser aux autres. Pour cela, nous nédifierons jamais le jeu sur des symboles, sous prétexte de donner aux jeux un ton plus spirituel. Dewey a dit que « jouer à la petite foire », « à la lavandière » ou à la cuisinière, nest pas moins spirituel que de jouer « aux 5 cavaliers ».
Une tâche paraît prosaïque ou spirituelle selon la formation des grandes personnes, mais chez lenfant les besognes utilitaires sont toujours entourées de mystères extraordinaires surtout lorsque ce sont les adultes qui les accomplissent. Cette atmosphère est un stimulant suffisant pour exalter limagination, jusquà idéaliser une réalité en apparence prosaïque.
Cest pour cette raison que le thème des jeux sera choisi par lenfant lui-même ; ce sera là une garantie quant à leur caractère spécifique.
Les adultes, éducateurs, sefforceront de ne pas surcharger ces jeux de symbolismes comme cela se produit dans les « kindergarten » allemands (jardin denfants) où ils ne servent quà divertir les parents en éveillant chez les enfants une imagination exagérée et maladive.
Quand lenfant commence à marcher et à parler, son observation méthodique nest plus déjà aussi facile. Il nous faut intensifier le respect de ses spontanéités, il faut nous préoccuper de créer une ambiance adéquate, il faut enregistrer les faits spontanés ou provoqués, parce que cest grâce à eux que nous pourrons contribuer au volume pédagogique, surtout si ce sont des faits permettant que la liberté et lactivité de lenfant soient portés insensiblement à un surpassement de son contenu instinctif.
La fiche que nous donnons comme type possède deux ou trois caractéristiques fondamentales.
1° Contrôle des enfants vaccinés et affligés de maladies incurables afin de pouvoir établir les séparations et isolements nécessaires en cas dépidémies ;
2° Courbes de poids et index de rachitisme ;
3° Registre des antécédents génétiques afin de réduire les suspects des points de vue tuberculeux ou syphilitique.
Il vaut mieux utiliser linclination naturelle des enfants vers le renouveau et vers la vérité, chose quils font dailleurs deux-mêmes, au bon moment.
Quand lenfant modifie son affinité, cest quil ne sait plus y trouver rien de nouveau. Il na plus rien à explorer, il abandonne.
Lexaltation de la fantaisie provoquée par des symbolismes inopportuns nous entraînera, par contre, vers dautres résultats : lenfant ne recherchera rien, parce que le thème qui lui est proposé ne lintéresse pas. Et cela ne nous convient pas.
Dans notre école maternelle, nous comprenons que lon doit prendre en considération lenfant du point du vue pédagogique et conformément à une école active.
Lon obtiendra ce résultat, en laissant jouer lenfant. Sil est entendu que lon agit de telle sorte que limpulsion initiale provienne de lenfant lui-même, il faudra quau moment de notre intervention nous sachions le diriger vers un perfectionnement du jeu, qui lui permette datteindre un plan supérieur.
Orientation Générale
au Premier Degré
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La distribution des Écoles maternelles doit être en rapport avec la future réforme urbaine des grandes villes. Dans les agglomérations citadines actuelles, sans ordre ni harmonie, il nest pas possible de projeter des installations convenables dÉcoles Maternelles. Dans la future distribution rationnelle de lhabitation, il faudra compter, comme on a fait dans dautres villes dEurope, avec la nécessité dinstaller, non pas les constructions monumentales qui ne sont quune erreur pédagogique, mais des pavillons simples et pratiques, au milieu despaces verdoyants bien distribués. Il convient plutôt de sattacher à lespace destiné aux jeux et qui permet la vie en plein air quà la classe elle-même qui devrait être plutôt un refuge et un lieu de repos.
Dans les édifices destinés aux écoles rurales, un local des enfants et auquel nous faisons allusion ne doit pas manquer.
Lactivité de lélève, dans cette étape de la vie infantile doit être seulement contrôlée et à peine dirigée. Lenfant doit jouer et se mouvoir en tout liberté individuelle ou collective et il est nécessaire que lon respecte sa façon spontanée de se grouper. Lenfant doit sincorporer dans son milieu naturel, chose vers laquelle tend son entité biologique non encore bien différenciée. La vie en toute liberté dans le jardin, parmi la nature qui lentoure, les plantes, les animaux (le spectacle de la reproduction et lélevage des animaux domestiques ne doivent pas manquer) sera la source primordiale déducation à cet âge-là. Afin de favoriser le développement du monde mythique enfantin, source de créations dénergies psychiques primaires, il faut utiliser le conte et la légende expliqués avec art et avec le plus grand effort dans la recherche de la perfection. Dans toute cette période, la conversation, lexpression libre prennent une grande importance, surtout si elles portent sur la vie elle-même, source dintérêt de tous les enfants. A la fin de ce cycle, on peut essayer de développer les facultés mentales délaboration au moyen de jeux éducatifs bien choisis.
A cette étape, comme à toutes les autres dailleurs, il faut prêter une grande attention aux réactions du corps en face de la nature afin quil en reçoive le maximum daction vivifiante par lair, la lumière, les larges espaces. Lalimentation rationnelle doit être en même temps une des préoccupations capitales de léducateur et du biologue.
Pour cette école maternelle, comme pour les différents degrés de lécole primaire dailleurs, nous pensons quon doit établir des petits centres ou pavillons qui, rationnellement groupés, constituent des collectivités de vie plus favorables à léducation.
Chaque groupe de pavillons décoles maternelles (garçons et filles), en coéducation, devra être sous la direction dun instituteur ou dune institutrice spécialisés, aidés fréquemment dans leur tâche, chaque fois que cela sera nécessaire, par un médecin et des puériculteurs.
PREMIER CYCLE SCOLAIRE
(DE SIX A HUIT ANS)
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En commençant les cycles, nous voulons éclairer le sens de cette dénomination qui ne doit pas être confondue avec le trop connu « Plan Cyclique » qui ne nous apparaît pas comme devant être lidéal. En disant : 1er cycle, 2ème cycle, etc
notre prétention nest autre que de vouloir diviser les matières de base en degrés, adaptés au progrès évolutif de lenfant.
Par contre, le plan de lÉcole active, appliquée au point de vue social fonctionnel et génétique, nous séduit davantage comme programme pédagogique à suivre.
Dans chaque cycle nous trouverons linitiation graduelle, toujours dans le sens de formation, aux matières et connaissances de base de la culture intellectuelle (Langage, Mathématiques, Physique, Chimie, Biologie, Sociologie) qui, dans ce premier cycle, constituent deux chapitres uniques et exclusifs :
DEUXIÈME CYCLE SCOLAIRE
(DE NEUF A ONZE ANS)
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Il serait presque suffisant de dire que dans ce cycle et dans les cycles postérieurs, les connaissances de base apprises au cycle antérieur doivent se préciser et se développer.
Cependant, sil est certain que, par lécole active, lenfant crée et réalise dans tous les domaines et que, ce faisant, il sinstruit puissamment, il nen reste pas moins que cela nest pas suffisant. Le travail doit se faire avec goût, cest-à-dire de bon gré.
Le plaisir est le stimulant indispensable pour que leffort demeure et soit fécond. Par cela même il est nécessaire que lenseignement ait les mêmes attraits que le jeu.
Dans ce cycle et dans tous les autres, il faudra donc sappliquer au choix du thème.
Il faut que le thème éveille un intérêt chez lenfant. On a beaucoup parlé des « centres dintérêt ». Peut-être vaut-il mieux ne pas préciser les tendances physiologiques de lenfant et deviner, à chaque instant, là où peut être son intérêt, suivant les circonstances.
TROISIÈME & QUATRIÈME
CYCLE SCOLAIRE
(JUSQUA QUINZE ANS)
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A cet âge naît lintérêt pour les choses abstraites. Ici commencent également la systématisation, les lois générales. Nous croyons quà cette période se termine la mission de lenseignement primaire global.
Naturellement, cela, du point de vue théorique, vu que, dans la pratique et afin de ne pas créer des conflits (motifs dadaptation entre le plan ancien et le nouveau régime), ces deux derniers cycles de lÉcole primaire se trouveront être les deux premiers de lenseignement secondaire de lancien régime.
Pendant les troisième et quatrième cycles, commencent à se dessiner les travaux du travailleur manuel.
Voici, dans tous les cas, la différence la plus marquée dans lenseignement primaire proprement dit.
SOLUTION IMMÉDIATE
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En attendant, pour linstant, que léquilibre social et économique auquel doit parvenir le peuple, rende possible la création de lécole que nous désirons tous, nous navons quà nous plier aux réalités existantes, pour si anormales quelles soient, et essayer de les améliorer en les adaptant à laccomplissement dune fonction urgente et immédiate.
A cette fin, les édifices acquis par le peuple seront utilisés par lécole et lon y réalisera les améliorations et adaptations nécessaires pour un usage occasionnel et provisoire.
Pour lorganisation rationnelle de ces locaux en tenant compte des facteurs économie, espace, temps, rendement on fera éventuellement appel aux spécialistes de lassistance aux enfants. Si ces mesures provisoires ne permettent pas de résoudre le problème scolaire pour toute la masse des enfants des grandes villes, on sefforcera dinstaller les nouveaux édifices qui se créeront non pas au centre des agglomérations, mais dans les faubourgs.
Cette même préoccupation est valable pour les villages où on rencontrera su ce point moins de difficultés.
Une fois résolu le problème de linstallation matérielle, reste à solutionner la question primordiale du choix des éducateurs.
Nous pensons que tout le personnel titulaire ne possède pas les aptitudes de base pour constituer la foule des éducateurs que les circonstances réclament pour faire surgir lécole nouvelle du peuple. Mais nous sommes persuadés par contre quil exister des citoyens que la honteuse et inique vie espagnole a empêchés darriver à une spécialisation pour laquelle ils étaient excellemment doués.
Nous pensons quil est possible de trouver, dans les générations actuelles autodidactes, des jeunes gens dont le caractère et lintelligence se forgent dans la lutte collective pour créer un monde nouveau. Soumis à une rapide préparation pratique, ces jeunes gens compléteraient facilement une formation qui ferait deux des collaborateurs précieux dans luvre de léducation populaire.
Tout le personnel enseignant aussi bien celui muni de titres que les nouveaux éducateurs sans diplôme mais ayant un immense désir de travail doit être mis à lépreuve, dans des stages denseignement et des cours dorientation, afin de sélectionner les véritables éducateurs de lÉcole Nouvelle.
Orientation Générale
Au Deuxième Degré
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De la même façon que dans les étapes antérieures, il faut essayer de camper lÉcole dans une ambiance propre et de la doter dun esprit nouveau.
LÉcole professionnelle subit, dans le monde entier, un moment de crise.
Cette école, celle que jusquà présent ont dû supporter les générations de nos enfants, répond de moins en moins aux aspirations culturelle de notre siècle et aux aspirations du monde que la nouvelle société doit créer.
Il nest pas difficile de remarquer que toute culture est aujourdhui sous les effets dune profonde rénovation. Une nouvelle attitude de lhomme en face de la vie, une manière différente de concevoir et dapprécier le but final, qui découle de structure sociale, a surgi.
La révolution industrielle et économique conduit la société de notre temps par des chemins et des carrefours dont lissue reste angoissante si elle nest éclaircie comme en Espagne par la secousse formidable et libératrice de la révolution du peuple.
Lhomme daujourdhui a perdu la foi eN un grand nombre de principes qui semblaient fondamentaux pour lhomme dhier. Une profonde réaction sentimentale contre des idées et des attitudes qui maintenaient une culture orgueilleuse et décadente a ouvert de nouveaux horizons aux curs et aux intelligences, horizons que lhomme se dispose à contempler dun regard serein et généreux. Lhomme a vu clair, pour lêtre vivant, la VIE est le grand problème et le véritable but à quoi tout est subordonné. La même pensée de lhomme éthique ne se justifie quen fonction et raison de la vie, encore quelle soit concrétisée par des intérêts dordre spirituel.
Avec ce nouvel esprit, avec cet esprit qui naît, surgit, naturellement, une nouvelle pédagogie et une nouvelle école. Une pédagogie du respect de la vie, de confiance en la vie et dans le pouvoir créateur que lhomme porte caché en lui et quil est capable de mettre au service de la collectivité si celle-ci nétouffe pas ce quil y a de plus profond et de plus valeureux dans lâme humaine : son originalité, sa spontanéité, le libre développement dun pouvoir sans limites, quil faut soigner et exalter comme force constructive de premier ordre, en face de la pédagogie ancienne, pédagogie oppressive, méconnue, intellectualiste, statique, antivitale, parce que la vie nest pas une immobilité mais bien une activité et surtout une activité spontanée.
Une bonne partie des écoles actuelles se composent de locaux exigus situés dans des rues étroites, au centre de la ville ou dans des quartiers populeux, ou dans des édifices en ruines, dans lagglomération sale et laide des communes. Par son installation même (qui noffre que le local, les salles de classe, les murs), il ny a pas dautre remède que de se replier dans lancienne technique scolaire héritée du moyen âge, triomphe du verbalisme, des leçons théoriques sans contact avec la réalité et de lintellectualisme sans âme, de lenseignement de toutes les choses avec des paroles et des livres de textes, pour former des enfants, esclaves dune éducation ayant fait faillite.
Et nous tenons à préciser que nous ne prononçons pas lexclusive contre les grands groupes scolaires, si à la mode dans quelques villes dEurope, il y a quarante ans. Le milieu éducatif qui se crée dans ces grandes agglomérations, sans large espace, avec des cours petites et obscures, est une ambiance adaptée à lantique conception pédagogique, rigide, uniforme dont le but était, principalement, dalourdir le cerveau des enfants avec des leçons théoriques pour soumettre leur activité, leur précieuse activité, à une discipline, qui, en certains lieux, finissait par prendre le caractère dune vie de caserne, le caractère dune grande multitude uniformisée.
Ces grands groupes scolaires ont été en grande partie couronnés dinsuccès. La preuve la plus évidente de leur insuccès, cest que, dans les grandes villes du monde entier, on les abandonne, pour en édifier dautres de nature différente.
Une école de ville dailleurs, quelle soit petite ou grande, si elle est située là où lexigent les nécessités dune agglomération urbaine désordonnée et irrationnelle, ne peut répondre aux besoins dune éducation normale des enfants.
Lambiance urbaine, résultat dune évolution large et compliquée, peut concorder avec les nécessités momentanées des adultes qui lhabitent. Elle ne saurait être en rapport avec la vie élémentaire de lenfant qui doit asseoir sa formation sur un milieu plus simple, plus naturel, plus logique, répondant à létat rudimentaire de son développement.
Cest à cause de ce désaccord essentiel et fondamental que nous proposons, pour léducation de lenfance, autant que possible la vie en marge des grandes agglomérations urbaines.
Notre ligne de conduite tend à rejeter la création décoles du type des grands groupes scolaires urbains qui imposent une certaine organisation désuète du travail, à tel point que, par force, doivent triompher le verbalisme, la routine, la passivité et linévitable oppression qui en est la conséquence. Nous devons, au contraire, encourager la création décoles simples, non monumentales mais petites, en forme de pavillons groupés dans des endroits verdoyants de la ville ou mieux en dehors de la ville. Dans ces pavillons sera enfin possible une vie en commun plus naturelle, plus cordiale, plus familière, mieux en contact avec le milieu ambiant, une vie pratique aussi associée au champ ou à latelier à lindispensable effort théorique.
Il y a une distribution matérielle enfin des salles de classe qui rend possible le travail de lécole active.
Les locaux qui doivent être occupés par les garçons et les filles (en principe les écoles de base pratiqueront la coéducation) devront être installés pour réaliser le concept de salles de travail, dans lesquelles il sera possible deffectuer des manipulations élémentaires, une étude pratique, à même les éléments et les phénomènes authentiques, des disciplines vitales de lécole.
Pour des enfants au-dessous de 12 ans, des classes ainsi conçues peuvent être suffisantes si on prend effectivement pour base de travail le champ scolaire et la vie même, en modifiant ainsi profondément lallure et le ton de lactivité enseignante.
Dans les pavillons abritant des enfants plus âgés, les salles datelier devront posséder le matériel nécessaire pour les activités élémentaires pratiques des garçons et des filles. On cherchera dans ces écoles moins un préapprentissage prématuré que lharmonie nécessaire entre les activités théoriques et les travaux pratiques de laboratoire et datelier (menuiserie, travaux sur fer, reliure, économie domestique).
Grâce à lÉcole traditionnelle, lÉcole nouvelle doit fonder son activité sur des principes psychologiques et sociaux qui conditionnent sa structure et son activité ! Principes et lois psychologiques qui conditionnent lorganisation du travail à cette étape.
Ainsi la loi de continuité de lesprit, la loi doriginalité et dindividualité, le principe du syncrétisme, la liberté, la coopération, etc
nous décident à déclarer que lécole, à ce degré, ne doit pas tomber dans linconséquence de lÉcole traditionnelle qui méconnaissait ou dédaignait ces lois fondamentales.
Nous croyons, au contraire, que la Nouvelle École doit découvrir et élaborer une technique du travail densemble, au moyen de laquelle il soit possible de découvrir les intérêts réels des enfants, lexpression sincère de ce quils sentent et de ce qui les touche.
Il faut pour cela mettre à la portée des écoliers des outils de travail, de documentation et de recherche afin que, de façon naturelle, surgissent un enseignement individualisé, une connaissance élaborée par leffort propre, une activité fonctionnelle de réactions, de désirs et dimpulsions naturelles.
Nous sommes persuadés quun travail conçu sur ces bases peut être suffisant pour satisfaire tous les intérêts de lenfance, pour répondre à toutes les exigences de la curiosité et du désir de savoir, pour permettre toutes les recherches. Et surtout cette activité est, une occasion naturelle dacquérir une foule de connaissances qui ne sont pas alors artificiellement ordonnées dans des livres et des programmes et qui répondent mieux à un ordre psychologique de lapprentissage quà un ordre soi-disant logique de la science presque toujours en désaccord avec une ferme didactique infantile.
Peut-être, de cette façon-là, nobtiendrons-nous par les reluisantes intelligentes des écoliers actuels dominés et opprimés par des données théoriques et verbales, mais nous formerons, en revanche, des personnalités vigoureuses et riches de possibilités créatrices.
Cette conception globale du travail scolaire nempêche pas que, dans les dernières années de lécole de base on tende à ordonner scientifiquement certaines connaissances, à les grouper harmonieusement autour des acquisitions que nous jugeons essentielles à ce degré : langage, calcul, étude de la nature, étude de lhomme.
Par létude de lhomme il faut entendre : étude de lhomme et de son milieu géographique, étude des efforts de lhomme pour conquérir la nature et atteindre à sa perfection : histoire du travail, de civilisation, de la coopération humaine et des progrès de la production, etc
Tout cela sans perdre de vue la fonction de lécole, comme organisme collectif qui, pour ainsi dire fusionné avec le milieu naturel et social où il rayonne, se développe pour exercer son influence et acquiert son caractère spécifique. Car nous ne concevons pas du tout notre école uniforme : nous la voulons différenciée, adaptée a milieu où elle se développe, où elle exerce sa fonction sociale.
Lécole rurale doit posséder les caractéristiques propres à la localité où elle est installée, de même que lécole urbaine.
Cependant, pour rendre plus réelle cette fusion entre lécole et le milieu, nous estimons nécessaire que chaque école soit inscrite, comme un organisme collectif supplémentaire, à une collectivité de production, à une collectivité de travailleurs, afin que les enfants puissent participer aux travaux et à la vie sociale des grands et en même temps, que la collectivité des travailleurs exerce son influence et sa tutelle par une attention de tous les instants, sur lécole de leurs enfants.
Ainsi se pose le problème du contrôle social de lécole, chose que nous croyons en tous points bienfaisante et même essentielle dans notre conception de luvre éducatrice.
Les maîtres, en dehors de leur inscription à des syndicats professionnels, doivent se confondre (comme partie intégrante de lécole) avec les intérêts et les activités sociales, comme la collectivité à laquelle sera annexée lécole. Et de la même façon les travaux doivent fusionner avec les intérêts et les activités de lécole, exerçant sur elle un contrôle social dune inestimable valeur.
LE PROBLÈME DE
LÉCOLE RURALE
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Les possibilités latentes de lécole rurale ont été toujours méconnues et dédaignées par les organisateurs de notre vieille école. Lécole rurale mérite cependant une attention toute spéciale non seulement du fait de sa grande extension en Espagne mais aussi parce que les circonstances et les condition particulières dans lesquelles elle peut évoluer offrent le milieu parfait pour léducation du peuple.
Le caractère et lorganisation de lécole rurale actuelle, intellectualiste et uniforme, contribuent à rendre plus précis et plus éclatants les motifs de décadence du génie campagnard. LÉcole rurale ne cesse dêtre une institution sans physionomie substantielle. LÉcole des milieux ruraux nest quune imitation servile et appauvrissante de lÉcole urbaine, laquelle nest à son tour quune copie des centre denseignement secondaire.
LÉcole sera considérée comme un organisme collectif qui doit occuper un lieu déterminé dans la vie sociale du milieu où il rayonne, et accomplir des fonctions déterminées, socialement nécessaires dans le plan général dactivité de la région.
La population rurale a besoin de son école, une école ayant sa physionomie propre, non une école de type prédéterminé. Lécole rurale doit posséder des qualités caractéristiques qui fassent delle un organe essentiel du milieu où elle développe son action sociale.
Le milieu naturel et social des noyaux villageois offre les conditions parfaites pour garantir une véritable uvre déducation. Lécole rurale doit rechercher son caractère en sappuyant sur la nature et le rythme naturel et simple de la vie paysanne.
Il est nécessaire dutiliser les condition excellentes, la base parfaite du milieu qui entourent lécole rurale pour empêcher son insuccès et pour créer la nouvelle école dont a besoin le peuple.
Et dans ce but, nous proposons en premier lieu :
1° Suppression obligatoire des disciplines, programmes ou matières denseignement, fixés dans les plans de travail de la technique scolaire actuelle ;
2° Réaction nécessaire contre le désir manifeste et général de voir le travail des écoles régi par un programme et un horaire fixes. Cette vision fragmentaire de la réalité et cette obligation sont incompatibles avec une uvre réellement éducative. Malgré que les grands groupes de lécole urbaine soient obligés daccepter ces fétiches, il ne faut pas que lécole rurale soit soumise à cette oppression antinaturelle. On doit la sauver ;
3° Il importe dorganiser à lécole rurale lessai des nouveaux plans de travail, préconisés dans les nouvelles méthodes et dans les nouvelles techniques de travail scolaire. De cette façon on parviendra à faire déplacer le centre de gravité de lécole des livres de textes et des programmes actuels vers la grande source éducative que sont la nature et la vie.
On parviendra ainsi à réaliser lintime relation qui doit exister entre la vie de lécole et la vie du milieu ambiant avec ses possibilités naturelles et ses nécessités. LÉcole pourra alors adapter son travail au milieu, en exerçant une influence profonde sur le développement et lamélioration de la vie des champs qui sont dune urgence essentielle.
4° Dans ces conditions, le maître-éducateur peut atteindre à la profonde influence éducative que nous demandons à lÉcole rurale. La clé de léducation morale dans les milieux ruraux consiste dans la valeur suprême du travail, dans lexaltation du noble métier du cultivateur, dans lextériorisation de cette émotion de la vie rurale et de la joie sans réserve de la nature, dans la conscience en la ferme et profonde destinée du prolétariat de la terre.
5° Nous demandons que dans le travail de lécole, il soit fait une large part au travail agricole, dans le jardin scolaire, mais dans le sens dune action pour réaliser une école active, une école de travail en contact avec la nature et en lutte avec elle pour lui arracher ses produits. Ne tombons pas dans lerreur dorienter lécole vers la formation professionnelle. Lécole de base ne doit pas se donner comme but de créer chez lenfant des techniques de travail agricole, mais bien au contraire, de développer surtout laptitude humaine et sociale.
Laction ultérieure des écoles spéciales dagriculture bénéficiera solidement de cette préparation générale et profonde de lécole primaire.
6° Pour que la mission que nous voulons donner à lécole rurale soit une réalité, il nous faut le maître-éducateur.
Nous avons trop dinstituteurs qui fuient les villages, par aversion pour le paysan illettré et fatigant. Il nous faut des maîtres pourvus dune solide formation culturelle, possédant principalement un sens social plein daltruisme, en rapport avec la mission qui leur est confiée, une claire conscience et une ferveur sincère pour luvre de léducation populaire. Il est nécessaire de former les maîtres avec un esprit tendu vers léducation du prolétariat.
Les maîtres de lécole rurale doivent recevoir la même préparation technique générale que les autres, mais la majeure partie de leur formation doit se faire en vivant au contact de la vie des champs sous la direction de professeurs qui ne soient pas exclusivement des intellectuels.
Il faut que le maître reçoive linfluence des biens culturels des villes. Il conviendrait de penser aux installations de résidences pour instituteurs, dans des milieux culturels, leur faciliter les voyages, les conférences, etc., etc
Tout cela sans oublier les satisfactions de la vie matérielle, dont doit pouvoir jouir le maître rural, qui sera doté des mêmes avantages que les instituteurs des villes.
7° Il est nécessaire de créer une nouvelle organisation des écoles rurales.
Voici la règle générale :
Créer dans chaque village lécole ou les écoles dambiance rurale.
Créer dans le centre régional lécole ou les écoles polytechniques.
Créer dans les localités bien situées lécole pratique dagriculture.
Dans quelques régions où les villages sont clairsemés, il sera préférable de concentrer les écoles. Là où il y aura suffisamment dhabitants pour quil y ait une école, la concentration nest pas à conseiller. Le village perdrait, en perdant son école, le centre culturel que celle-ci doit constituer, le travail intellectuel étant en coordination avec le travail social de tout le monde.
8° Lécole nouvelle rurale aura un jardin et un champ dessais agricoles, une cuisine scolaire, une bibliothèque et un atelier.
9° Dans chaque école rurale il devra y avoir une classe pour les tout petits.
10° Lécole, darchitecture sobre, sera située aux alentours du village.
(pour éviter dallonger inconsidérément cette étude, et pour rester aussi dans le cadre, suffisamment vaste déjà, de notre école primaire, nous ne reproduisons pas les chapitres du document espagnol se rapportant aux : Âges de lorientation initiale, les diverses techniques de base, le problème de la sélection, Relations entre techniciens et universitaires, problèmes de lenseignement supérieur et polytechnique, lUniversité, le front culturel, chapitres dont la préoccupation essentielle reste le souci de réaliser véritablement lécole unique au service du peuple).
LENSEIGNEMENT
ARTISTIQUE
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Maintenant que les disciplines artistiques vont faire leur entrée dans lÉcole unifiée, à côté dautres enseignements de base et confondues avec eux, il nous faudra les doter dune haute valeur humanitaire, primordialement et essentiellement éducative. Nous désirons et nous voulons que leur enseignement soit harmonieusement organisé, aux heures de bouleversement et de rénovation que nous vivons.
Nous voulons que leur pratique cesse dêtre une distraction de lennui ou une satisfaction de la vanité. Il nous faudra obtenir en les élevant au niveau des grandes catégories que les enseignements des Beaux-Arts et des professions artistiques ne puissent être compris comme « matières dornement ».
Nous désirons placer lécole face à la nature pour clarifier et aérer son esprit, affiner sa sensibilité, augmenter sa capacité de curiosité, de recherche et dacquisitions. Nous désirons réveiller lintérêt de lenfant, développer ses facultés et aptitudes et le pousser, par dopportunes évasions de la part du professeur, au contact suggestif de lessence de la vie.
LÉcole Unifiée ne prétendra jamais faire des génies, ni des artistes, ni encore moins des simulateurs et des fabricants de produits frelatés. Nous voulons simplement préparer des créateurs. Et quand nous disons : préparer des créateurs, nous navons pas en vue la production duvres catalogables entre lartisanat et le génie, mais la culture vivante et éducative du processus créateur. Cela veut dire créateurs duvres humbles ou de grande classe, mais créateurs authentiques.
Nous supprimerons de ce processus de création véritable, tout artifice, toute simulation, toute apparence trompeuse, toute exaspération de lhabileté et de lexploitation. Mais nous doterons le métier et sa technique de toute la perfection et de toute la valeur humaine quils méritent.
Nous nadmettrons pas que cette valeur dune portée supérieure produise, bouleversée, ces uvres dapparence plaisante et dune fausse facture artistique qui furent familières aux années de décadence. Nous ne voulons pas que ce faux Art se confonde avec le processus créateur quil priverait de ses vertus en laffaiblissant. Nous nadapterons pas un magnifique tuyau à un misérable fil deau boueuse et nous ne laisserons pas se disperser et se perdre nos belles sources deau pure et fraîche.
Que la perfection technique nexclue ni ne paralyse laction vivante et authentique de lesprit, ni que celui-ci oublie et dissipe celle-là. Éducation en face du professionnalisme habile et composé. Investigation, recherches vivantes et pénétrantes contre les distractions pompeuses de lhabileté et de lartifice. Léclat du fait vivant de création et sa réalisation devant les uvres reluisantes et les montages de grande apparence. Lintérêt hardi et soutenu contre léparpillement affecté de loisiveté ; le vivant et vrai travail contre la facile soumission à la vanité.
Nous voulons que ce soit lécolier qui ouvre sa propre terre avec toutes les perfections techniques pour y faire fructifier la semence des mille voix de la nature et de la vie.
Ainsi la vivante éducation artistique fera elle-même les semailles et ouvrira au peuple scolaire des chemins multiples et efficients.
Les Arts fils du peuple, tombés en esclavage, au service exclusif dune classe, doivent être rendus au peuple. Ils doivent vivre de lui, par lui et pour lui. Nous allons rénover jusquà ses entrailles lenseignement des Beaux-Arts. Il nous faudra mettre à cette tâche, toute la puissance de notre foi, une réelle activité de transformation, un zèle intense et un grand enthousiasme pour réaliser la grande ambition de lÉcole Nouvelle Unifiée.
LA LANGUE MATERNELLE
A LÉCOLE
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Pour la part décisive que la langue a dans lefficacité de lenseignement, le Conseil de la Généralité de Catalogne a fixé dans le décret suivant, sa position et son point de vue:
« Aucune convention ne peut justifier la violation des droits de lenfant, quincarnent les droits de la nature. Parmi ces droits, celui de lenfant a pouvoir user de sa langue propre celle avec laquelle il est venu à la vie est reconnu par tout le monde et consacré par les congrès du bilinguisme.
Et si, dans ce droit on fonde la personnalité dans ce quelle a de plus universel, sa défense est des plus justifiées.
Il ny a que les fortes personnalités qui soient capables de recevoir le choc de toutes les idées, pour se mettre en fonction de toutes sortes de cultures, pour entrer en possession de toutes sortes de langues. Une personnalité ne peut se targuer dêtre forte, tant quelle ne sest pas elle-même créée dans son ambiance, ambiance dont fait essentiellement partie la langue. Donc, en défendant la langue de lenfant, est défendue en plus la possibilité de possession dautres langues, qui ne peut être considérée comme définitive, que quand lenfant a développé pleinement ses propres organes dexpansion. Parce que cest sur la base de la langue maternelle que doit sédifier la possession de toutes les autres langues, base la plus vivante et la plus naturelle. Le problème de la langue a donc un double aspect, un premier aspect de dignité nationale et un deuxième aspect defficacité pédagogique. Nous, Catalans surtout, qui devons à notre langue, notre renaissance littéraire et nationale, devons lui rendre justice, pour tout ce quelle signifie pour nous et pour tout ce que nous attendons encore delle.
La République qui représente une revendication de droits violés, a reconnu tout de suite les droits de lenfant par rapport à la langue, par le décret du 29 avril 1931. Maintenant que nous sommes arrivés au moment de détruire toutes les injustices, nous devons liquider définitivement cette question de la langue, dans lenseignement, uvre si bien commencée par les gouvernements de la République.
Et cest pour cela que lun des problèmes qui a le plus intéressé le Conseil de lEcole nouvelle unifiée, dès le premier moment, a été celui de la langue.
Sur la proposition du Conseiller de Culture et daccord avec le Conseil, je décrète :
ARTICLE PREMIER. Lenseignement pré-maternel, maternel et primaire, dans les écoles de Catalogne, se fera, à la base, dans la langue des enfants. Le maître utilisera lidiome de lenfant, là où la répartition des enfants en groupes, ne sera pas possible.
ARTICLE 2.- Encore que la langue de base de la conversation, des textes ou des enseignements soit la langue maternelle, la deuxième langue ne sera sous aucun prétexte négligée dans la mesure où, dune façon naturelle, la vie ou lambiance le comportent.
Il faut cependant ne jamais faire violence à lesprit de lenfant. Lécole sur ce point sera le reflet de la rue, où, généralement, les deux langues vivent en commun.
ARTICLE 3.- Quand on verra que lenfant est suffisamment formé dans sa propre langue, ou quand il aura terminé le processus dacquisition du langage et quil sera alors capable de sexprimer verbalement, et par écrit dans les formes des grandes personnes, commencera alors, avec intensité, létude de la deuxième langue, le catalan pour les enfants parlant le castillan et le castillan pour les enfants de langue catalane. Cette étude aura une triple base : en premier lieu et par-dessus tout, on stimulera le langage parlé, la connaissance grammaticale donnera lusage de la langue et enfin le langage littéraire communiquera le contenu spirituel de la deuxième langue.
Dans le développement normal, lâge où devra commencer létude de la deuxième langue devra être dix ans.
ARTICLE 4. Létude du catalan sera obligatoire pour tous les maîtres qui ne le connaîtront pas, exception faite de ceux qui auront pour mission denseigner aux enfants leur langue maternelle et qui sera le castillan. Les maîtres résidants hors de Barcelone, pourront utiliser dans ce but les services denseignement par correspondance gratuits, organisés par la Généralité de Catalogne et ceux résidants dans Barcelone pourront assister à des cours-conférences organisés par le Conseil de culture, lequel donnera également les dispositions nécessaires pour délivrer les certificats daptitude linguistique à lenseignement du catalan et toutes dispositions complémentaires pour lapplication de ce décret.
Barcelone, le 18 septembre 1936
Louis COMPANYS, Le Conseiller de Culture: Bonaventure GASSOL
Publié dans le Journal Officiel du 22 septembre 1936
Exemplaire n° 0509
Traduit par Monsieur Alfons MIAS,
Professeur de Catalan du Collège dé Occitania de Castelnaudary,
Décembre 1936.